Comment intégrer la seconde main dans votre expérience client ?
par Sébastien Neveu, 2 juillet 2025

Les clients ne se contentent plus d’acheter. A travers leur consommation, ils sont aussi en recherche de sens.
Par leurs décisions d’achat, ils expriment, ce qu’ils sont, ce à quoi ils croient. Ils s’engagent volontiers avec des marques qui, via leur identité et leurs actions, entrent en résonance avec leurs préoccupations.
Face à l’urgence écologique et à la montée des préoccupations éthiques, de nombreux clients, notamment parmi les jeunes générations, aspirent à une consommation plus responsable.
Pour les retailers, il faut s’adapter à cette évolution des attentes, qui voit les consommateurs acheter non seulement pour répondre à un besoin fonctionnel mais aussi à une vision du monde. La seconde main s’impose dans le paysage du retail, invitant les enseignes à repenser leur stratégie et à intégrer ces nouveaux usages dans l’expérience client.
Mais comment passer du discours à l’action ? Quels sont les bénéfices concrets de ces nouvelles pratiques pour les enseignes et leurs clients ? Et surtout, quelles actions mettre en place pour réussir ce virage ?
Pourquoi intégrer la seconde main dans votre expérience client ?
Plus qu’une simple tendance, la seconde main s’inscrit dans une dynamique de transformation profonde du commerce.
Les retailers ne peuvent plus l’ignorer car elle :
- Répond à des attentes très fortes des consommateurs
- Offre des perspectives de nouveaux revenus
- Contribue à l’image et à la réputation de la marque.
Une évolution en phase avec les nouvelles attentes des consommateurs
Les Français sont nombreux à aspirer à une consommation plus responsable. 74 % d’entre eux tiennent désormais compte des critères de durabilité dans leurs décisions d’achat.
La quête de sens et l’éthique guident de plus en plus les décisions d’achat, en particulier chez les jeunes générations qui valorisent l’économie circulaire et la réduction du gaspillage.
Entre cette aspiration à consommer de manière plus responsable et les difficultés des Français en matière de pouvoir d’achat, la seconde main tend à devenir une habitude. Le marché de la seconde main était estimé à 64 milliards de dollars en 2023. Les prévisions font état d’une croissance annuelle de 12% jusqu’en 2028.
Par exemple, dans le secteur de la mode, une étude de l’observatoire Natixis Payments montrait que les achats de seconde main avaient progressé de 140% entre 2019 et 2021.
De nouvelles opportunités économiques
Si la seconde main répond aux attentes des consommateurs, les commerçants y trouvent eux aussi leur compte.
Les chiffres confirment l’intérêt économique du marché de l’occasion. En 2023, 64 % des Français ont acheté un produit d’occasion au cours des 12 derniers mois, et le marché global de la seconde main a généré 105 milliards d’euros, avec une croissance attendue de 11 fois plus rapide que celle du marché du neuf.
Intégrer la seconde main et la durabilité permet aux retailers de :
- Générer de nouveaux revenus
- Fidéliser leur clientèle existante
- Attirer de nouveaux segments sensibles au prix ou à l’écologie
Des avantages environnementaux
La seconde main et les pratiques durables contribuent à la réduction des déchets et à l’allongement de la durée de vie des produits.
Acheter un vêtement d’occasion permet, par exemple, de réduire de 82 % son empreinte carbone par rapport à un achat neuf.
Les initiatives de réparation, de reconditionnement et de réemploi limitent l’extraction de nouvelles ressources et participent à la lutte contre l’obsolescence programmée, répondant ainsi à l’urgence écologique.
Un impact positif sur l’image de marque
Enfin, s’engager dans la seconde main et la durabilité renforce l’image de marque et permet de se conformer à une réglementation de plus en plus exigeante.
En France, la loi AGEC impose des obligations en matière de :
- Information sur la réparabilité
- Gestion des déchets
- Lutte contre l’obsolescence programmée.
Les enseignes qui prennent de l’avance sur ces sujets ne font pas que répondre à une attente des consommateurs. Elles bénéficient aussi d’une meilleure réputation, se différencient de la concurrence et anticipent les évolutions législatives.
6 conseils pour intégrer la seconde main à votre expérience client
Créez des espaces dédiés en magasin (corners, rayons, meubles de collecte)
L’intégration de la seconde main dans l’expérience client commence par la création de points de contact physiques attractifs et visibles.
Installer des corners ou rayons dédiés, comme l’a fait H&M dans sa boutique parisienne des Galeries Lafayette, permet d’offrir une expérience qualitative de la seconde main. La collection "Pre-loved" y est présentée sur une dizaine de mètres carrés, avec des vêtements soigneusement sélectionnés, pliés et mis en valeur, loin de l’image traditionnelle de la fripe. L’objectif ici est de rendre la seconde main désirable, y compris auprès de clients habitués à acheter des articles neufs.
Cette approche séduit une clientèle large, au-delà des adeptes de la seconde main, et permet de proposer une gamme de prix étendue (de 7,99 à 299 euros), tout en acceptant des pièces de différentes marques pour élargir l’offre.
Dans le secteur de l’ameublement, Ikea a ouvert un magasin dédié à la seconde main à Eskilstuna, en Suède, alimenté par des meubles endommagés ou retournés, remis à neuf avant d’être revendus ou donnés à des associations.
Ce dispositif est renforcé par des meubles de collecte en magasin, qui facilitent la reprise des produits.
Formez vos équipes à ces nouveaux parcours de consommation
La réussite de ces dispositifs de seconde main repose sur l’implication et la formation des équipes.
Les collaborateurs doivent être formés pour expliquer, promouvoir et accompagner les clients dans ces nouveaux parcours : reprise, revente, réparation ou location.
Ils deviennent ainsi les ambassadeurs de la démarche circulaire, capables de guider les clients et de valoriser l’expérience seconde main au même titre que l’offre classique.
Un service après-vente adapté vient compléter l’expérience :
- Évaluation de l’état des produits repris
- Remise en état
- Conseils sur l’entretien ou la réparation.
Les collaborateurs, champions de l’expérience client, sont aussi les champions de l’expérience de la seconde main.
Intégrez la seconde main dans votre expérience digitale
Le développement de l’offre de seconde main passe aussi par les canaux digitaux. Zalando, Kiabi, Decathlon ont chacun développé leur propre plateforme ou onglet dédié à la seconde main sur leur site e-commerce.
Cette stratégie permet de toucher une clientèle plus large, de faciliter l’accès à l’offre d’occasion et de renforcer la visibilité de l’engagement durable de l’enseigne.
Dans un marché dominé par les « généralistes de la seconde main » comme Leboncoin et les marketplaces spécialisées (Vinted, Vestiaire Collective, Back Market), les retailers traditionnels tentent de tirer leur épingle du jeu.
Certaines enseignes, comme Aigle avec "Second Souffle" ou The Kooples avec "Second Love", créent des espaces en ligne où clients et vendeurs peuvent échanger, acheter ou revendre des articles de la marque, tout en garantissant l’authenticité et la qualité des produits.
Des plateformes de seconde main, comme Paradigme, permettent aux marques de racheter des articles auprès de leurs clientes en échange de bons d’achat, puis de les revendre via un corner dédié.
Le secteur de la mode n’est pas seul concerné. Par exemple, Boulanger propose une offre de seconde main appelée "Second Life" pour l’électroménager reconditionné.
Decathlon propose une expérience omnicanale de la seconde main avec son dispositif "Seconde Vie". Le client peut estimer gratuitement le prix de son matériel en ligne et trouver le magasin éligible le plus proche.
Misez sur des modèles hybrides neuf/occasion/location
Pour intégrer la seconde main et la durabilité à leur expérience client, certains retailers misent sur des modèles hybrides combinant produits neufs et d’occasion, services de location et systèmes d’abonnement.
Cette approche permet de répondre à des besoins variés, de la recherche de prix attractifs à la volonté de consommer de manière plus responsable.
Par exemple, Petit Bateau, propose à la fois des vêtements neufs, des articles de seconde main et un service de location de vêtements pour les enfants. Ce modèle circulaire séduit les parents soucieux de l’environnement et du budget.
Dans le secteur du sport, Décathlon, en plus de son offre de seconde main, a mis en place un service de location de matériel (skis, vélos, etc.) qui permet aux clients de tester différents équipements avant d’investir, de profiter de matériel performant sans l’acheter, et de limiter le gaspillage.
Organisez la reprise et le reconditionnement en magasin
Dans l’expérience de vente/achat de seconde main, la reprise et le reconditionnement jouent un rôle clé.
De nombreuses enseignes proposent désormais de racheter les anciens produits des clients en échange de bons d’achat ou de réductions sur leurs prochains achats. Ces articles sont ensuite remis en état, reconditionnés et revendus à prix réduits.
Par exemple, Fnac-Darty est un acteur majeur de ce marché avec son service de réparation et de reconditionnement, qui permet de donner une seconde vie aux appareils électroniques et électroménagers. Les clients peuvent rapporter leurs anciens appareils en magasin, bénéficier d’un diagnostic et d’une réparation sur place, ou acheter des produits reconditionnés avec une garantie.
Apple propose également un programme de reprise de ses anciens appareils, qui sont ensuite reconditionnés et revendus à prix réduit, ou recyclés si leur état ne permet pas une seconde utilisation.
Mettez en avant les bénéfices écologiques et économiques en toute transparence
Pour encourager l’adoption de la seconde main et des pratiques durables, les retailers doivent communiquer de manière transparente et pédagogique sur les bénéfices écologiques et économiques de ces démarches.
Mettre en avant les économies d’eau, d’énergie ou de matières premières réalisées grâce au réemploi, informer sur la réduction des déchets et des émissions de CO2, et valoriser les prix plus attractifs des articles d’occasion sont autant de leviers pour sensibiliser les consommateurs et les inciter à changer leurs habitudes.
Par exemple, Patagonia intègre systématiquement des informations sur l’impact environnemental de ses produits et de son programme "Worn Wear" dans sa communication, en magasin comme en ligne. L’entreprise détaille les ressources économisées grâce à la réparation et à la revente de vêtements, et encourage ses clients à adopter un mode de consommation plus responsable.
De son côté, Décathlon met en avant les prix attractifs de ses articles "Seconde Vie" et explique comment l’achat d’un produit d’occasion permet de pratiquer son sport préféré tout en limitant son impact sur la planète.
La seconde main n’est plus un épiphénomène ou une pratique réservée à certains secteurs (comme l’automobile).
Aujourd’hui, les Français sont de plus en plus nombreux à acheter d’occasion, pas seulement par contrainte mais souvent par choix, que ce soit pour des vêtements, de l’électroménager, des équipements sportifs, …
Pour les enseignes, l’intégration d’une offre de seconde main est une réelle opportunité, à condition de l’intégrer de manière fluide dans l’expérience client omnicanale.
Pour réussir cette transition, les enseignes peuvent s’appuyer sur l’écoute client et sonder les consommateurs sur leurs attentes en matière de seconde main (expérience de revente, expérience d’achat).
Source image : Canva
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